top of page

Portrait d'Artisane : Sara, de l'Atelier Papier

Sara, de l'Atelier Papier
Sara, de l'Atelier Papier

Quand j’étais petite, je passais mes vacances chez ma grand-mère, qui faisait du bénévolat dans une bibliothèque d’hôpital. Là-bas, je voyais des bénévoles recoudre les vieux livres avec du fil et une aiguille, avec une patience infinie pour leur donner une nouvelle vie. Cette image m’est restée en tête : l’idée qu’un objet abîmé puisse retrouver une nouvelle existence, entre savoir-faire et délicatesse.


Alors, quand j’ai découvert Sara et L’Atelier Papier, j’ai immédiatement pensé à ces souvenirs. Relieuse artisanale, elle perpétue l’art de la reliure avec passion, fabriquant sur mesure des carnets, albums et livres uniques, tout en intégrant une dimension écoresponsable et collaborative à son travail.

Dans cet article, elle nous raconte son parcours, sa fascination pour le papier et l’importance du geste artisanal. Une rencontre inspirante avec une artisane qui donne une seconde vie aux mots.


Peux-tu partager avec nous l'histoire qui se cache derrière la naissance de ton métier d'artisane et de l'Atelier Papier ?


Ce projet d’artisane-relieuse, c’est tout un parcours de vie avec comme fil rouge : le livre.


Je crois qu’au tout début il y a un amour du livre, des mots, du papier. J’ai toujours lu, j’ai toujours écrit, rempli des carnets. J’ai été tour à tour salariée d’une librairie associative, animatrice d’ateliers d’écriture, bibliothécaire. J’ai pas mal de cordes à mon arc autour du livre. Et puis parallèlement à tout ça : depuis ado, je collectionnais des vieux papiers, je bricolais du papier, j’aimais le côté travail manuel, la dimension artisanale des choses. J’étais très attirée par l’univers des livres d’artistes également.


En 2018, dans une période compliquée de ma vie professionnelle, j’ai voulu franchir un pas et me former sérieusement à la reliure artisanale. J’ai pris des cours à l’atelier de reliure de Céline Giordano à Marseille. J’avais besoin de concrétiser quelque chose, j’avais besoin de rentrer dans une démarche artisanale et créative avec rigueur et sérieux.

Le projet de L’Atelier Papier est né à ce moment-là. Je me suis faite aider par la couveuse d’activité Potentielles pour les femmes entrepreneuses. Le projet était né, c’était officiel, je pouvais faire mes premières factures.


Ce projet de L’Atelier Papier : c’est un atelier de reliure artisanale : je fabrique sur mesure des carnets vierges, des albums photos, des livres d’or, des livres uniques, des livres d’artistes. Je travaille sur commande pour des professionnels, des artistes, des particuliers. Je participe à des expos-vente. Je suis invitée à collaborer avec d’autres artistes, artisanes. C’est très varié au final.


Et avec L’Atelier Papier, j’anime également toute une série d’ateliers et de formations autour du livres et du papier. Là aussi, c’est très varié : des ateliers d’initiation à la reliure, des lectures aux tout-petits (des moments de lecture à voix haute pour les tout-petits de 6 mois à 3 ans)...


Atelier Papier

Peux-tu partager une anecdote inspirante ou un moment clé qui a profondément influencé ton approche créative ou ton parcours en général ?


Un des moments clés de mon parcours d’artisane a été l’arrivée dans mon premier local d’atelier à la Belle de Mai à Marseille en 2018. J’avais tellement rêvé d’avoir un atelier : un lieu où je pourrais stocker mes matières, mes outils, un lieu dédié à ça et un lieu où je pourrais travailler dans une ambiance inspirante, un lieu où je pourrais laisser les choses en plan pour y retravailler le lendemain. Je réalisais un vieux rêve ; c’était une sensation très agréable.


Ce 1er atelier était un atelier partagé. Mes collègues d’atelier étaient des femmes artistes très inspirantes. On créait des évènements avec les ateliers voisins : ce furent des années très joyeuses. Un lieu partagé : ça réduit les coûts du loyer et ça fait chaud au cœur dans les moments compliqués des métiers d’indépendants.


Quels éléments ou valeurs caractérisent le plus ton travail en tant qu'artisane, et comment ceux-ci se reflètent-ils dans tes créations ?


Mes valeurs en tant qu’artisane : c’est difficile de répondre à une telle question.

Je dirais en premier lieu la beauté du geste de l’artisan, la beauté du travail bien fait, la minutie. Certains clients sont venus à L’Atelier Papier avec des demandes que les machines des imprimeurs ne pouvaient pas faire.  L’artisane dans ces moments-là se sent importante : ça fait chaud au cœur  !


Une autre valeur importante dans mon travail d’artisane : le partage, la collaboration.

En tant que relieuse artisanale, quand je réponds à la demande d’un client, je me plie au désir du client mais j’y apporte ma touche personnelle forcément. J’aime le va et vient d’idées avec le client. J’écoute le projet, j’y apporte mes connaissances techniques, je propose des matières, des techniques de reliure. C’est un véritable échange, une véritable collaboration.


J’aime aussi les collaborations avec d’autres artisans, artistes. J’aime la contrainte : je trouve que c’est toujours intéressant : ça permet d’explorer de nouveaux possibles.


l'Atelier Papier
Collaboration avec Yannick Martin de Studio Wha-t

Et puis j’aime quand les univers se mélangent : relier un livre avec des techniques de reliures artisanales traditionnelles quand les couvertures de livres sont réalisés par un artiste de street-art : ça me plaît beaucoup de mélanger les genres, les univers. La tradition et l’ultra contemporain. Là je pense à un projet de carnets XXL réalisé avec Yannick Martin de Studio Wha-t à la demande d'une association culturelle marseillaise.


Dans mes réalisations : j’aime assembler des éléments différents, dont des matières recyclées. J’aime les réalisations qui sont évolutives, les reliures avec des éléments qu’on peut ajouter, enlever, remettre.


Comment intègres-tu la dimension écoresponsable dans ton travail, que ce soit dans le choix des matériaux, les méthodes de fabrication, ou d'autres aspects de ton processus créatif ?


Je travaille beaucoup avec des papiers de récupération. J’ai tout un stock de vieux papiers, de vieux livres glanés par-ci par-là depuis très longtemps. De vielles partitions de musiques, des vieux carnets écrits à la main et achetés en brocante, des vieilles encyclopédies : je déchire, je désosse…

Je puise dans cette collection pour créer de nouveaux objets-livres. J’insère quelques pages dans mes réalisations de reliure.

J’aime créer la surprise au fil des pages.


Parle-nous d'une réalisation qui t'a particulièrement marqué(e) dans ta carrière d'artisane. Qu'est-ce qui la rend spéciale, et quelles difficultés as-tu surmontées pour la mener à bien ?


Une réalisation particulière dans mon parcours : le projet L’objet d’une rencontre en 2022.


Ma candidature avait été retenue par la Chambre des métiers et de l’artisanat pour participer à ce projet. C’était une grande première pour moi : j’étais fière d’avoir été retenue.


Ce projet réunissait 20 artisans et 20 designers de la région, répartis en 20 binôme : 1 artisan et 1 designer qui ne se connaissaient pas.

 L’objet d’une rencontre - Sara Hug et Raphaël Cei
Collaboration avec Raphaël Cei, dans le cadre du projet " L’objet d’une rencontre" - 2022

Pour ce projet, j'ai été amenée à travailler avec le designer Raphaël Cei (Rinku design). Nous devions créer à 4 mains un objet : l’objet de notre rencontre.


Puis les 20 objets créés par les 20 binômes artisans-designer ont été exposés au Musée d’Histoire de Marseille pendant plus de 3 mois : ce fut un très beau projet, une très belle exposition.


Je ne me souviens pas de difficulté particulière. Avec Raphaël, nous avions un grand sens pratique. Nous avons vite trouvé l’idée du paravent qui rappelait la technique de reliure criss-cross et nous avons assemblé nos savoir-faire.

Là encore j’ai aimé la contrainte. Ça m’a amené là où je n’avais encore jamais été.


Peut-être la seule difficulté ce fut notre rapport au temps et à l’urgence qui était très différent. J’aime travailler en amont avec lenteur et mon binôme était plus habitué à travailler dans l’urgence, au dernier moment. Mais nous avons tout rendu en temps et en heure et je suis ravie de ce projet.


Atelier Papier

En quoi consiste le processus créatif type pour toi, de l'idée initiale à la réalisation finale d'une pièce ou d'un projet ?


Tout part d’une idée : le domaine du rêve, de l’utopie, du possible. Puis très vite, je réalise un petit croquis, un dessin.  

Si c’est le projet d’un client ou une collaboration, il y a discussion, échange d’idées, va et vient d’idées. Si je suis seule aux manettes : j’échange avec moi-même ; ça me va aussi !


Un projet avance pas à pas. J’aime prendre mon temps, je déteste l’urgence, de plus en plus avec l’âge. J’ai besoin de lenteur, d’étapes, de revenir sur l’étape précédente : seule ou à plusieurs. Puis vient le 1er prototype, souvent avec des matières de récup. J’aime particulièrement cette étape. Puis c’est le choix des matières définitives.


Puis selon le projet il y a parfois la 1ère réalisation perfectible. Et enfin la réalisation finale. Pour moi, le processus créatif : c’est toute une série d’étapes du rêve à la réalisation, du rêve au concret !


En tant qu'artisane, comment navigues-tu entre les demandes spécifiques des clients et ta vision artistique personnelle ?


Même dans la commande d’un client, j’ai l’impression d’exprimer ma sensibilité artistique, ma créativité. Et comme je l’ai déjà dit, j’aime la contrainte : ça m’a permis d’explorer des pistes que je n’aurais pas explorer seule.


Mais c’est vrai que je commence à réfléchir à un projet d’exposition personnelle autour du livre et de ma vision de l’objet livre. J’ai déjà le titre de cette exposition et déjà un petit carnet à idées dédié à ce projet. Mais je suis lente alors ce sera peut-être un projet qui prendra vie dans 10 ans ou plus quand je serai très vieille comme l’aboutissement de mon parcours de vie.


Enfin, aurais-tu un prochain projet à nous partager ?

Je travaille actuellement à un beau projet dans le cadre de la 3ème édition des Partisanes, évènement créé à Marseille par Caroline Pelletti-Victor, dans son espace L’annexe du Bunker des Calanques. L’idée étant là aussi de provoquer des rencontres entre artisanes-artisans et de faire naître de beaux objets.


J’ai été invitée par Solange Battarra (Upcharafi) artiste-artisane qui travaille la matière papier et Céline Lantez, dessinatrice, brodeuse. Elles ont toutes deux participé à l’édition précédente des Partisanes et pour cette année, elles m’ont invitée à rejoindre l’aventure. Nous allons donc collaborer et créer quelques objets à 6 mains dans le cadre de ce projet. Je suis très heureuse de cette nouvelle collaboration.

 

Retrouvez Sara sur son compte instagram : @sarahug.latelierpapier pour suivre son actualité

Comments


Commenting on this post isn't available anymore. Contact the site owner for more info.

LES DERNIERS ARTICLES

bottom of page